N’oubliez pas la Volvo !

Bien sûr il y a la Route du Rhum et je ne suis sûrement pas le seul à me connecter dès le réveil et à remettre ça quasiment toutes les heures pour suivre la course. Mais en attendant que toute la flotte partie de Saint-Malo attrape les alizés, nous pouvons déjà savourer la première arrivée de la Volvo. Le vainqueur du parcours entre Alicante (Espagne) et Le Cap (Afrique du Sud) est Abu Dhabi, skippé par Ian Walker qui arrive 12 minutes devant Dongfeng skippé par Charles Caudrelier et 4 heures devant Team Brunel de Bouwe Bekking…

La Volvo Ocean Race, c’est cette course autour du monde en équipage qui a lieu tous les trois ans et dont la dernière édition a été gagnée – cocorico – par Franck Cammas et son équipage sur Groupama. Sur cette nouvelle édition, les bateaux sont un peu plus petits, beaucoup moins puissants mais ils empruntent à peu de chose près le même parcours avec des équipages encore plus réduits. Autant dire que c’est du sport de haut niveau, même si les bateaux sont un peu moins physiques. Et comme les équipages embarquent obligatoirement un reporter, on ne manque pas d’images ni de récits d’ambiance à bord pour vivre la course au plus près. Bon, le site de la course est encore plus compliqué que celui de la Route du Rhum mais ne boudons pas notre plaisir. Cette première étape est déjà très riche d’enseignements.

Première leçon : Azzam le bateau d’Abu Dhabi skippé par Ian Walker a clairement justifié son statut de favori. Il arrive en tête au Cap après avoir mené toute la course pratiquement depuis les îles du Cap Vert. Pour sa troisième participation consécutive, avec un bateau qu’il a eu le temps de prendre en main, cet équipage aguerri assume son statut. Il ne lâchera rien.

Deuxième leçon : Dongfeng le bateau chinois mené par des Français n’a pas l’intention de faire de la figuration. Charles Caudrelier, vainqueur de la dernière édition à bord de Groupama, n’a jamais caché qu’il avait l’ambition d’arracher une étape mais on ne pensait pas qu’il jouerait la victoire sur la première. Son handicap ? Il a embarqué des régatiers chinois qui, pour certains, n’avaient jamais passé une nuit en mer il y a seulement six mois. La formation accélérée mise en place ne remplace pas l’expérience et au milieu d’un équipage très réduit, le manque d’initiative de quelques-uns peut vite se transformer en temps et en milles perdus. Le résultat obtenu – une place de deux – n’en est que plus remarquable. Surtout quand on sait que l’équipage a cassé un safran – et l’a remplacé – et connu une autre casse mécanique (un pad eye sur lequel était montée une poulie de gennaker) dont les conséquences auraient pu être plus graves.

Troisième leçon : Les monotypes nivellent les performances mais n’interdisent pas le jeu tactique. Knut Frostad, le directeur de la course, nous l’avait annoncé : les bateaux vont tous à la même vitesse et il ne faut pas croire que l’on puisse revenir sur un adversaire simplement en « mettant du charbon » (VM n°226). De fait, sur les derniers jours les positions sont restées figées, les bateaux s’alignant pour rejoindre l’arrivée. Mais avant ce final, il y a eu du jeu, des coups stratégiques, de la chance bien sûr mais aussi de l’audace qui a payé. La traversée du pot-au-noir a coûté cher à l’équipage espagnol (avec des Français dedans) de Mapfre. Pendant qu’Abu Dhabi et Brunel s’échappaient par l’ouest, Mapfre, SCA, Alvimedica et Dongfeng dans une moindre mesure étaient « tankés » au centre. Vestas Wind réussissait un joli coup en s’extrayant par un improbable bord à l’est. En Atlantique Sud le bateau danois osait à nouveau en poussant plus sud que ses petits camarades et revenait un moment sur le podium. Comme quoi il ne faut pas avoir peur de prendre des risques.

Quatrième leçon : L’apprentissage est rapide. On peut avoir formé son équipage quelques semaines seulement avant le départ et faire figure d’épouvantail. C’est le cas de l’équipage du bateau danois Vestas Wind, composé d’anciens du Team New Zealand qui avaient couru la précédente Volvo à bord de Camper. Ils n’ont pas mis longtemps à trouver le mode d’emploi. Tout le monde a le même bateau, tout le monde a les mêmes voiles et du coup personne n’a de botte secrète à sa disposition. Interrogé avant le départ sur l’arrivée tardive de certaines équipes dans la course (dont la sienne), Michel Desjoyeaux, équipier à bord de Mapfre avait balayé la question d’un revers de main : « On peut dire ce qu’on veut, on verra sur l’eau ». C’est tout vu.

Cinquième leçon : Les bateaux ont semble-t-il tenu le coup. Il y a bien eu un safran de cassé sur Dongfeng mais lié à un choc avec un OFNI. Plus embêtant, car susceptible de se répéter, le pad-eye qui s’arrache sous la tension de l’écoute de spi ou de gennaker : il faudra sans doute prévoir des renforcements ou au moins des vérifications sur tous les bateaux. Mais si l’on compare avec la dernière édition dans laquelle deux bateaux avaient démâté dans la première étape (Abu Dhabi et Puma) et où un troisième avait connu des problèmes structurels, la monotypie a du bon. Sans parler de la première édition disputée à bord des VOR 70 (gagnée par ABN Amro) où les systèmes de vérins de quille basculante avaient posé d’énormes problèmes.

Source: http://www.voilemagazine.com/2014/11/noubliez-pas-volvo/#more-15256

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